Aller au contenu

Voyage en stop: comment calculer son empreinte carbone?

64 Partages

Si aujourd’hui, nous n’avons aucun mal à estimer notre empreinte carbone grâce à la multitude de calculateurs en ligne (notamment pour les volets transports, habitation et services), il est en revanche beaucoup plus difficile de trouver des chiffres fiables concernant des modes de déplacement plus alternatifs… En utilisant les quelques ressources disponibles et l’expertise de Clément, un ingénieur en énergie, nous tentons de détailler, dans cet article, les modes de calculs pour estimer son empreinte carbone en stop!


Note: nous ne traiterons ici que des émissions de gaz à effet de serre (facteur le plus courant et utilisé de nos jours dans les analyses environnementales).

Se déplacer en stop: un bilan zéro?

Nous souhaitons commencer par combattre une idée reçue: tout déplacement pollue (plus ou moins). Oui oui, même la marche! Concernant l’autostop, beaucoup pensent que l’empreinte carbone des autostoppeurs est nulle, car l’autostoppeur(se) occupe l’espace disponible d’un véhicule déjà en mouvement, qui ne devrait pas faire plus de kilomètres que prévu (sauf si le conducteur fait un petit détour pour déposer son passager, mais cela reste un cas rare, anecdotique). Sauf que… En autostop, il faut prendre aussi en compte le poids que nous rajoutons au véhicule: nous, nos sacs… Des poids qui sont, par rapport au poids total d’une petite voiture, non négligeables. Or, plus le véhicule est lourd, plus il consommera du carburant pour avancer, et plus il polluera.

En savoir plus sur les énergies, les transports et l’écologie

Calculer son empreinte carbone en autostop

Le cas des voitures en stop

Pour calculer notre empreinte carbone en autostop et comparer les résultats avec d’autres modes de transport, nous prenons en compte deux paramètres: l’émission moyenne d’une voiture, et sa consommation selon le poids ajouté.

  • Bilan de gaz à effet de serre d’une voiture: nous nous sommes basés sur les chiffres fournis par l’ADEME (Agence française de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). Dans nos calculs, nous utilisons donc la valeur moyenne de 193gr CO2eq émis/km par voiture (mais dans le détail, ça peut aller du simple au double entre une petite voiture et un gros 4×4)
  • La consommation d’un véhicule selon le poids ajouté: pour ce point, deux sources sont venues se complémenter.

D’abord, et comme le démontre Clément dans son analyse de l’écologie et des transports:

Prenons l’exemple simple d’une voiture classique qui consomme 10L/100km: l’autostoppeur, qui pèse 80kg avec son sac, représente environ 5% du poids de la voiture (1500kg). Si nous considérons la consommation de la voiture comme étant linéaire à son poids (ce qui est en réalité pas tout à fait vrai, mais presque), la voiture consommera 5% supplémentaires soit 10.5L/100km.

Et enfin, d’après le site Caradisiac, le poids impacterait la consommation de carburant comme suit:

La consommation de carburant d’une voiture particulière augmente de 7% quand le véhicule s’alourdit de 100kg

Même si il est difficile d’obtenir des valeurs précises, ces deux approches nous ont permis d’obtenir à peu près le même résultat: un(e) autostoppeur(se), en fonction de son poids et celui de son sac (entre 65 et 100kg au total), contribuera à augmenter la consommation moyenne d’une voiture entre 4 et 7% (soit de 7,7gr à 13,5gr CO2/km /passager en plus).

Le cas du camion-stop

Calculer son empreinte carbone en camion-stop devient plus compliqué: il faudrait prendre en compte le modèle du camion, son tonnage, sa capacité réelle au moment où on monte dedans (roule-t-il à vide? Plein?), etc

Voici quelques chiffres pour te donner une idée:

 

Lorsque l’on ajoute 32T à un camion vide, cela revient à augmenter sa consommation moyenne de 34%. Par régression linéaire, on peut en déduire qu’ajouter 100kg revient à augmenter la consommation moyenne du camion d’environ 0,1%. L’impact est donc très négligeable, 100 fois moindre qu’avec l’autostop par exemple. Encore une fois, on rappelle qu’il faut prendre ce chiffre avec des pincettes car beaucoup de facteurs rentrent en jeu… Il s’agit simplement d’une estimation, pour nous permettre de se donner une idée!

Comparaison de l’autostop avec d’autres modes de transport

Covoiturage vs autostop

Toujours en reprenant notre exemple d’une voiture qui émettrait 193gr CO2/km par passager, en tenant compte de l’augmentation du poids de la voiture (ce que les calculateurs ne prennent pas en compte, pour le moment), nous obtenons les résultats suivants:

  • Une voiture avec 2 passagers: son impact est d’environ 100-104gr CO2/km et par personne
  • Une voiture avec 4 passagers: son impact est d’environ 54-58gr CO2/km et par personne

En comparaison, et comme nous l’avons vu précédemment, faire de l’autostop reviendrait à augmenter la consommation du véhicule de 4 à 7%, soit 7,7 et 13,5gr CO2 émis/km par passager en plus. De plus, comme le souligne Clément:

Le conducteur de covoiturage va (pas toujours, c’est vrai) définir son trajet pour des raisons économiques. C’est en effet plus avantageux de faire du covoiturage que de prendre un ticket de train, mais conduire seul n’est pas avantageux en terme d’écologie! Il y a donc un argument financier qui motive le marché du covoiturage: c’est dans l’attente et l’espoir d’avoir des passagers que le conducteur va aussi se déplacer en voiture. Dans ce cas précis, la pollution est partagée équitablement entre tous les passagers.

Bus longue distance vs autostop

Selon les chiffres de l’ADEME, l’émission moyenne de CO2 en autocar serait d’environ 26gr CO2/km/passager (2 fois mieux qu’une voiture avec 4 passagers). En comparaison, on émettrait de 2 à 5 fois moins de CO2/km en autostop!

Avion vs autostop

Même si la comparaison est tentante, il est extrêmement difficile de comparer ces deux modes de déplacement – car les distances parcourus et le temps passé à voyager sont totalement différents.
Par curiosité, lors de nos bilans annuels, nous avons comparé à chaque fois notre bilan carbone de l’année en parcourant une distance précise en autostop, versus une estimation de notre empreinte carbone si on avait parcouru cette même distance en avion… Et les résultats sont sans appel!

Alors même si un trajet en avion est toujours plus direct qu’un trajet par voie terrestre (pas de contraintes géographiques), en se focalisant uniquement sur les distances, on se rend bien compte qu’un trajet en avion n’est pas du tout écologique. Par exemple, si on parcourt 17000km (soit l’équivalent d’un aller simple Paris-Sydney en avion), on se retrouve avec un bilan CO2 de 3,6 tonnes/personne pour l’avion, contre… 131kg à 229,5kg CO2/personne pour la même distance parcourue en autostop.

Note: notre calcul est basé uniquement sur les émissions de CO2, mais il faudrait prendre en compte également d’autres éléments: émissions de particules fines, coût écologique de la fabrication d’une voiture ou d’un avion, pollution liée à l’activité humaine et de tous les services à bord d’un avion (nourriture, papier, plastiques…). Dans tous les cas, en y ajoutant ces paramètres, l’avion se voit globalement plus pénalisé.

L’empreinte carbone en voilier-stop, cobaturage

Comme pour le camion-stop, beaucoup de facteurs rentrent en jeu dans le calcul de son empreinte carbone en voilier: utilisation du moteur ou de la voile, régime du moteur (nombre de tours/minute), modèle du moteur, taille du bateau, tonnage, etc. Dans notre aventure, nous avons navigué avec des capitaines qui utilisaient le moteur tous les jours pour avancer plus vite dès que le vent disparaissait, comme avec un capitaine qui n’a utilisé que ses voiles pour une traversée de 14 jours en mer.

En voilier-stop, nous considérons seulement le poids que notre présence rajoute (notre propre poids, celui de nos sacs, toute l’eau douce et la nourriture en plus…) pour estimer l’empreinte carbone du surplus de consommation du moteur – sur le même principe que l’autostop. Grâce au simulateur qu’une amie skipper et ingénieure en construction navale nous a fourni, et en prenant l’exemple d’un voilier de 15 mètres, nous pouvons estimer qu’à 10 Tonnes le moteur consomme 1,786 L/h pour aller à 5 nœuds, contre 1,792 à 10,1 Tonnes. On en conclue qu’ajouter 100kg reviendrait à augmenter de 0,35% la consommation du moteur (si utilisation). Ce n’est qu’un ordre de grandeur, mais cela reste bien plus négligeable qu’un trajet en autostop!

 

Si tu souhaites rentrer dans le détail des chiffres, nous pouvons te partager l’exemple précis d’un calcul de l’empreinte carbone en voilier – basé sur une de nos expériences où nous savons exactement quelle quantité de carburant avait été consommée!

  • Nombre de personnes à bord: 4 (le capitaine, et 3 équipiers)
  • 40L de diesel consommés
  • consommation estimée à 2L/h, avec un moteur tournant en moyenne à 2000tpm (régime habituel)
  • vitesse moyenne sous moteur: 5 nœuds (5 milles marins par heure, soit 9,26km parcourus en une heure)
  • distance totale parcourue: 500 km
  • estimation de la distance parcourue au moteur: 185km
  • émission moyenne de CO2: 2,3 kg CO2/L

Si ce trajet était considéré comme un co-baturage, notre bilan carbone aurait été de 46gr CO2/km/personnesoit le même ordre de grandeur que le bilan carbone d’un covoiturage avec 4 passagers!
Cet exemple est également intéressant, car le capitaine avait une utilisation raisonnée du moteur pour de la navigation costale (manœuvres entrées/sorties du point d’ancrage, vent trop faible pour gonfler les voiles). Ceci dit, lors de la navigation en pleine mer, l’utilisation du moteur peut être bien plus rare.

Les autres formes de stop: avion-stop, ferry-stop…

On termine cet article en évoquant les autres formes de stop, plus exceptionnelles. Comme pour l’autostop, l’objectif du stoppeur(se) est d’occuper une place vide, dans un appareil dont le départ est déjà programmé. Le poids ajouté par l’autostoppeur(se) étant bien négligeable par rapport au poids total de l’appareil (entre 50 et 70T pour un Airbus A320, 19500T pour notre ferry-stop philippin en capacité pleine), on peut dire que l’incidence du poids ajouté sera nul sur la consommation.

En revanche, il existe un autre impact avec ces autres formes de stop dont on parle peu. Sauf si tu arrives à stopper un jet privé, ces transports, très polluants (impact des ferries), obéissent aux lois du marché (offre selon la demande). Lorsqu’un autostoppeur(se) réussit à monter gratuitement dans un avion ou un ferry, son nom se retrouve sur la liste des passagers – et vient s’ajouter aux statistiques de la compagnie. De plus, en échange du ticket gratuit, il est souvent demandé une contrepartie telle que faire de la publicité pour ces compagnies… Tu l’auras compris, l’autostoppeur(se) crée de la demande – qui va de facto générer de la pollution. Mieux vaut donc se contenter, dans la mesure du possible, de l’autostop et du voilier-stop!

En savoir plus sur le voyage alternatif

* Article rédigé d’après notre expérience personnelle *

64 Partages

2 commentaires sur “Voyage en stop: comment calculer son empreinte carbone?”

  1. Super intéressant! On avait calculer notre empreinte carbone lors de notre dernier voyage en stop mais on laissait une marge d’erreur étant donner que c’était compliqué de calculer le poids. Merci pour ces conseils!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

64 Partages
Share
Pin
Tweet